L’apport de la gouvernance d’entreprise au développement des PME camerounaises : le rôle de l’APGAIDO

D’après une étude de l’OCDE, les PME contribuent fortement au développement économique des pays développés, allant parfois jusqu’à 80% de la réalisation de la croissance économique dans certains pays. Or cette contribution n’est pas la même au Cameroun où, d’après une étude de l’organisation camer-cap parc, sept (07) entreprises sur dix (10) créées au Cameroun entre 2010 et 2015 n’ont pas survécus, ce qui dénote d’un taux de mortalité élevé des PME camerounaises.

Pourtant, dans le Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi adopté en 2009, ces PME étaient supposées jouer un rôle majeur dans le processus d’amélioration de la croissance économique. Le dispositif mis en place par le gouvernement à travers la création de l’Agence des PME, du Bureau de Mise à niveau des PME, de la banque des PME, se justifie pleinement, au regard de ce constat.

Malgré ce dispositif, le développement et la survie des PME ne semble guère reluisant et de nombreuses raisons continuent d’être évoquées pour justifier ce faible niveau de développement, ainsi que leur taux de mortalité élevé. Seulement, les faiblesses liées à la gouvernance de ces dernières sont le plus souvent ignorées ou alors citées en dernière position.

Cet article qui découle de l’observation et des analyses a pour particularité qu’il attribue une autre raison au taux de mortalité élevé des PME et leur faible niveau de développement, par rapport aux autres études. Nous souhaitons montrer que ces défaillances sont plutôt dues à la faiblesse du dispositif de gouvernance au sein de ces entreprises et organisations, contrairement aux autres raisons présentées dans les différentes études qui mettent l’accent sur les difficultés d’accès au financement et à la pression fiscale.

La gouvernance d’entreprise se définit comme l’ensemble des procédures et structures mises en place pour diriger et gérer les affaires d’une organisation de façon à assurer transparence et équilibre des pouvoirs entre le management, les propriétaires de l’entreprise et leurs élus à l’assemblée générale et les administrateurs.

L’objectif de cet article est donc de montrer que le développement de la PME et de toute organisation doit se faire de manière endogène, à partir de l’adoption et de la mise en pratique des outils de la gouvernance d’entreprise. Une fois ce préalable satisfait, les autres mesures d’accompagnement, notamment l’octroi de subventions et des financements, mises en œuvre par l’Etat et bailleurs de fonds pourraient aisément produire des résultats satisfaisants.

L’article se subdivise en trois parties : La première présente les PME au Cameroun, avec un accent sur leurs principales difficultés, la seconde énonce les conditions du développement des PME dans le contexte Camerounais ainsi que l’apport de la gouvernance d’entreprise et de ses outils dans ce processus. La troisième partie quant à elle présente la contribution de l’APGAIDO dans l’accompagnement des PME et des organisations camerounaises dans leur processus de développement à travers la mise en œuvre de ces outils (III).

I- Zoom sur les PME camerounaises et leurs principales difficultés

De nombreuses études ont été réalisées par des experts et organisations divers concernant les PME Camerounaises. Sur cette base, nous allons tout d’abord présenter le rôle des PME dans l’économie camerounaise (A), puis, dégager leurs principales difficultés (B).

A- Définition et contributions des PME à l’économie camerounaise

La définition et la présentation de la typologie des PME (1) est nécessaire pour dégager leur contribution à l’économie camerounaise (2)

1. Définition de la PME et répartition en fonction de leur taille au Cameroun

La définition (a) et la répartition des PME (b) au Cameroun s’effectue en fonction de leurs tailles.

a) Définition

La définition officielle de la PME au Cameroun découle de la loi n°2010/001 du 13 avril 2010 portant promotion des Petites et Moyennes Entreprises (PME). Ce texte propose des critères permettant de classer les entreprises dans les catégories « Très Petite Entreprise » (TPE), « Petite Entreprise » (PE), « Moyenne Entreprise » (ME).

Ainsi, nous avons :

TPE : Entreprise qui emploie au plus 05 personnes et dont le chiffre d’affaire annuel hors taxe n’excède pas 15 millions de francs CFA.

PE : Entreprise ayant un effectif employé permanent compris entre 06 et 20 personnes et réalisant un chiffre d’affaires annuel hors taxe compris entre 15 et 100 millions FCFA.

ME : Entreprise qui emploie au moins 21 et au plus 100 personnes et dont le chiffre d’affaires annuel hors taxe est compris entre 100 millions et 1 Milliard FCFA.

b) Répartition des PME en fonction de leurs tailles au Cameroun

Au Cameroun, d’après le fichier du MINPMEESA en 2015, il existait un nombre total de 93 969 entreprises (TPE, PE, ME, GE inclus). Sur les entreprises recensées :

  • 65 986 (74,9%) étaient considérées comme des entreprises de très petite taille (TPE) ;
  • 16 937 (19%) étaient des entreprises de petite taille (PE) ;
  • 4 499 (5,1%) étaient des entreprises de taille moyenne (ME) ;
  • 722 (0,8%) étaient comptées comme des entreprises de grande taille.

Conformément à ces estimations, on peut conclure qu’il existe un nombre total de 87 422 PME et que plus de 95% des entreprises camerounaises tombent dans la définition des PME. Par conséquent, la PME constitue l’essentiel du tissu économique des entreprises Camerounaises et donc l’un des moteurs essentiels du développement de l’économie.

2. La contribution des PME à l’économie camerounaise  

Afin d’apprécier la contribution réelle des PME à l’économie camerounaise (b), il est nécessaire de faire ressortir la répartition des PME camerounaise par secteur d’activité (a).

a) Répartition des PME par secteur d’activité

Sur la base du recensement effectué par le MINPMEESA, la répartition en (%) des PME est la suivante dans les différents secteurs de l’économie Camerounaise :

  • 0,3% dans le secteur primaire (agriculture et élevage) ;
  • 13,1% dans le secteur secondaire (agro-industrie et industriel ;
  • 85,2% dans le secteur tertiaire (commerce et service).

Il est à noter que dans le secteur tertiaire, les entreprises moyennes sont en tête du classement et exercent beaucoup plus dans les activités commerciales où elles occupent un pourcentage de 53, 3%.

b) Contribution à la création des richesses et à la lutte contre le chômage

D’après une étude de l’INS en 2015, les PME pesaient un chiffre d’affaire de 3 000 milliards de FCFA et représentaient à elle seule 70% de création d’emploi au Cameroun.

Malgré ces efforts, les PME Camerounaises buttent face à deux défis importants que sont la résorption du chômage et la création de richesse.

En effet, d’après l’étude de camercap-parc, la multitude d’entreprises créées n’a pas pu résorber le chômage des jeunes, qui demeure une préoccupation importante pour le gouvernement camerounais. Cela se justifie par les déclarations des promoteurs qui affirment que sur les 40 502 entreprises créées dans les centres de formalités de créations d’entreprises (CFCE) entre 2010 et 2015, ont généré 52 530 emplois salariés, soit une moyenne de 1,30 employé par entreprise.

Aussi, les entreprises créées dans les secteurs susceptibles de générer la croissance ne représentent qu’une part infime de 1,1% du total des entreprises existantes. Par conséquent, le niveau de création des richesses par les nouvelles entreprises sont minimes, malgré leur nombre.

B- La vie des PME et leurs principales difficultés au Cameroun

La vitalité des PME (1) est parsemée de nombreuses difficultés (2), d’après les études.

1. Création, survie et mortalité des PME camerounaises

Entre 2010 et 2015, près de 40 500 entreprises ont été créées dans les centres de formalité mise en place par le gouvernement Camerounais, d’après une étude de Camercap-parc. Sur cet effectif, 31 298 ont pour nature juridique « établissements » (ETS), soit près de 77,27%, le reste étant constitué de Société à Responsabilité Limité (SARL) et de de Société Anonyme (SA).

D’après cette étude, les « ETS » présentent le taux de disparition le plus élevé avec plus de 82%. Il est donc courant de les voir mourir après 1 ou 2 ans et renaître à la 3ème année avec une autre dénomination en fonction des intérêts et du contexte. « Les ETS sont créés à la circonstance ou à l’occasion sans véritable vocation d’entreprise et donc de durabilité. Un parent ou ami promu gestionnaire de crédit crée ou suscite la création d’une structure gérée par son épouse, sa petite amie ou son frère », dénonce l’étude. Ainsi donc, il apparaît évident que l’activité de prestation de services, à laquelle se déclarent 53% des Ets créés, présente « un lien incestueux avec la commande publique », indique le rapport. Ainsi, ces Ets sont généralement des entreprises unipersonnelles, dans les « mallettes », créées essentiellement pour réaliser la commande publique, sans créer des emplois ou de la valeur. Elles s’inscrivent dans une logique de redistribution du budget de l’Etat, c’est-à-dire du « gâteau national », et leur durée de vie dépend de celles des ordonnateurs de crédits.

Selon le Camercap-Parc, les sociétés anonymes (SA) et les sociétés à responsabilité limitée (SARL) présentent le taux de survie le plus élevé, soit 64% et un taux de mortalité de 36%. Cette pérennité qui est plus observée à Douala, qui présente un taux de survie de 59%, avec une large représentation des SA/SARL dont le nombre est de 5 846, contre 2 119 à Yaoundé. Ce qui confirme, d’après l’étude, l’esprit d’entreprenariat qui anime les habitants de cette région, contrairement à l’opportunisme rencontré à Yaoundé. Le même résultat est observé à Bafoussam avec un taux de survie de 34%, supérieur à la moyenne nationale qui est d’environ 28%.

Pour ce qui est des secteurs d’activités, la mortalité est plus élevée dans les prestations de service avec près de 76%, alors que la transformation présente le taux le plus faible avec un taux de d’environ 34%. De même, ce taux de mortalité est de 53% pour l’agriculture et l’élevage, ou encore 68% pour le commerce.

2. Les Principales difficultés des PME

D’après une étude de la Japan International Coopération Agency (JAICA),menée en 2009 pour le compte du Ministère des Petites et Moyennes Entreprises, de l’Economie Sociale et de l’Artisannat, les principales difficultés auxquelles font face les PME Camerounaises sont :

  • La difficulté d’obtenir des financements ou des emprunts ;
  • le cout élevé des matières premières, des machines et des pièces détachées importées ;
  • les commandes instables des clients ;
  • l’insuffisance des capacités de production pour satisfaire les grandes commandes.

Selon une autre étude[1] menée par Afriland First Bank, les principales difficultés auxquelles font face les PME sont :

  • des structures fortement personnalisées ;
  • l’insuffisance d’une culture du respect des engagements ;
  • le lancement d’activités par simple imitation ;
  • la mauvaise tenue de la comptabilité ;
  • des lacunes dans la gestion financière ;
  • une connaissance insuffisante du marché.

II- Le développement des PME et l’apport de la gouvernance d’entreprise

A- Les conditions de développement d’une PME

Le développement à long terme de toute organisation dépend de deux facteurs majeurs qui sont d’une part de l’adéquation entre les objectifs stratégiques qu’elle s’est fixées et les moyens mis en jeu pour les atteindre (1) et de sa réputation auprès de ses parties prenantes d’autre part (2). Sur cette base, il peut est évident d’évaluer les PME camerounaise face au respect de ces conditionnalités (3).

1. L’adéquation entre les objectifs stratégiques et les moyens mis en jeu

D’après le cadre de référence de gestion des risques COSO (…), avant le lancement d’un projet ou d’une entreprise, le ou les promoteurs identifient les opportunités à saisir, se fixent des objectifs à atteindre, définissent une stratégie pour les atteindre et mettent enfin des « moyens » en jeu pour les atteindre. En général, ces objectifs sont de deux ordres pour les entreprises à savoir, faire du profit et se pérenniser.

            Dans l’imaginaire des promoteurs de PME, de certaines grandes entreprises et d’autres organisations Camerounaises, lorsqu’on parle de « moyens », la première idée qui vient en tête est celle du financement qu’il faut injecter dans une activité pour atteindre les objectifs fixés. Or, d’après ce cadre de référence COSO, avant de mettre en jeu les finances, il est indispensable d’identifier les risques majeurs pouvant empêcher l’atteinte de ces objectifs. Une fois ces risques identifiés, des mesures pour leurs gestions doivent être prédéfinies avant de lancer effectivement les activités. Ces mesures de gestion des risques constituent avec les finances, l’ensemble des moyens à mettre en œuvre pour s’assurer qu’une entreprise créée pourra effectivement atteindre les objectifs qu’elle s’est fixée.

Ainsi, de nombreuses activités échouent dès leur lancement à cause de cette absence d’identification des risques et de la définition de politiques pour y faire face. Evoluer sans ce dispositif de gestion des risques équivaut à faire un saut dans l’inconnu et il n’est donc pas surprenant de voir un certain nombre d’entreprises, petites, moyennes ou grande, ne jamais réussir vraiment à décoller après leur lancement, devenant de véritables gouffre à sous pour les promoteurs.

2. Sa réputation auprès des parties prenantes

« Il faut 20 ans pour construire une réputation et cinq minutes pour la détruire. Si vous gardez ça à l’esprit, vous vous comportez différemment ». W. BUFFET

« Les deux choses les plus importantes n’apparaissent pas au bilan de l’entreprise : sa réputation et ses hommes ! » H. FORD

Ces deux citations témoignent de l’importance de la réputation pour une entreprise comme élément stratégique pour sa réussite. Pour une entreprise ou une organisation, la réputation tient à la qualité de la relation avec son personnel, la capacité de satisfaire sa clientèle, de rémunérer les actionnaires et enfin au respect de la règlementation.

Cela suppose donc que l’entreprise doit en permanence chercher à produire en qualité et quantité suffisante pour satisfaire sa clientèle et faire du profit, tout en respectant la règlementation.  Également, l’entreprise doit être productive et savoir vendre et, grâce au profit réalisé, elle doit pouvoir payer son personnel, tenir à ses engagements auprès de ses partenaires financiers et rémunérer convenablement ses actionnaires.

Malheureusement, de nombreuses entreprises qui n’ont pas pris au sérieux la gestion de leurs risques de réputation ont vu leur image ternir aux yeux du public, conduisant à leur faillite immédiate. Nous pouvons citer comme exemple les cas des entreprises frappés par des scandales tels que ENRON, WORLDCOM, qui à la suite du maquillage de leurs états financiers, ce sont retrouvés exposés aux yeux du monde et sanctionnés par les autorités de régulation, ce qui a conduit à leurs fermetures immédiates.

3. Évaluation des PME sur les conditions internes mises en œuvre pour favoriser leur développement

Cette évaluation a été faite sur la base des conditions de développement d’une PME ou d’une organisation que nous venons de présenter et conformément aux études menées par la Japan International Cooperation Agency (JAICA) et Afriland First Bank, qui révèlent les principales difficultés des PME. Nous avons abouti à la conclusion selon laquelle les PME camerounaises souffrent de l’inadéquation entre les objectifs fixés et les moyens mis en œuvre pour les atteindre au moment de leurs lancement (a), ainsi que de l’absence d’un mécanisme de construction et de gestion de leurs réputations pendant qu’elles fonctionnent(b).

a) L’inadéquation entre les objectifs fixés et les moyens mis en œuvre pour les atteindre

Les éléments qui militent à l’adoption de cette conclusion et qui proviennent des études sus-évoquées sont :

  • Le lancement d’activités et de projets par simple imitation ;
  • la mauvaise tenue de la comptabilité ;
  • les lacunes dans la gestion financière ;
  • la connaissance insuffisante du marché ;
  • l’insuffisance des capacités de production pour satisfaire les grandes commandes.
b) Absence d’un mécanisme de construction et de gestion de la réputation

Les éléments qui militent en faveur de l’adoption de cette conclusion sont :

  • Des structures fortement personnalisées ;
  • la difficulté d’obtenir des financements ou des emprunts ;
  • l’insuffisance d’une culture du respect des engagements ;
  • l’insuffisance des capacités de production pour satisfaire les grandes commandes.

Par conséquent, de nombreuses entreprises et PME au Cameroun n’arrivent pas à se développer et tombent le plus souvent en faillite du fait de la mauvaise image ou réputation projetée aux yeux du public. Aussi, pour beaucoup, cette mauvaise réputation est la conséquence soit du non-paiement des salaires du personnel, du non remboursement des crédits contractés, de la mauvaise qualité du produit, de la non rémunération des actionnaires, du non-paiement des impôts et des charges sociales et enfin de la fourniture de mauvais services à la clientèle.

B- L’apport de la gouvernance dans le développement des PME et autres organisations

La gouvernance d’entreprise joue un rôle majeur dans le développement des PME et des organisations camerounaises au travers de l’adoption et de la mise en œuvre de ses outils en leurs seins. Nous allons tout d’abord énumérer ces outils (1) avant de présenter les bénéfices (2) qu’ils engendrent et qui concourent au développement de la PME ou de l’organisation.

1- Les outils de la gouvernance d’entreprise

Les outils de mise en œuvre de la gouvernance d’entreprise découlent de sa définition. Plusieurs définitions sont proposées et contribuent à identifier les principaux outils de la gouvernance d’entreprise.

Ainsi, à titre de rappel, la gouvernance d’entreprise se définit comme l’ensemble des procédures et structures mises en place pour diriger et gérer les affaires d’une organisation de façon à assurer transparence et équilibre des pouvoirs entre le management, les propriétaires de l’entreprise et leurs élus à l’assemblée générale et les administrateurs.

Cette définition met en exergue deux groupes de mots à savoir les concepts de transparence et d’équilibre d’une part et ceux de procédures et structures. Sur cette base, nous allons distinguer les outils de contrôle (outils qui permettent d’assurer la transparence et l’équilibre des pouvoirs) et les outils de fonctionnement et de performance (procédures et structures) de la gouvernance d’entreprise.

a) Les outils de fonctionnement et de performance de la gouvernance : les procédures et la structure de l’entreprise

De nombreuses PME et organisations ont tendance à croire qu’elles ne sont pas concernées par la gouvernance d’entreprise dans la mesure où leur forme juridique est unipersonnelle et elles ne disposent pas de conseil d’administration.

Pourtant, pour fonctionner de manière optimale, chaque organisation, que ce soit une PME, une coopérative, une association ou un GIC a le devoir de tisser un réseau solide avec les partenaires financiers (banques, établissements de microfinance et autres), les fournisseurs et les clients. Et comme nous l’avons vu plus haut, la principale matière première de la construction de ce réseau c’est la réputation de cette organisation.

Cette réputation elle-même est le fruit d’une construction qui trouve sa base dès le lancement de l’entreprise, à travers la conception et la mise en œuvre d’une structure organisationnelle et de procédures adaptée à l’organisation.

A cet effet, il s’avère nécessaire de mettre en exergue les notions de structures organisationnelles et de procédure, ainsi que leurs importances.

  • La structure organisationnelle et son importance au sein d’une organisation

D’un point de vue organisationnel, « on désigne par structure la manière dont sont organisés ensembles les parties d’un tout… la structure définit des attributions de chacun, leur rôle, la répartition des tâches entre les membres salariés et, éventuellement entre les associés[2] ».

Sur la base de cette définition, il apparait clairement l’importance pour une organisation d’être assez structurée car sans définition et respect des attributions et du rôle de tout un chacun au sein de l’organisation, il serait véritablement difficile pour elle de fonctionner harmonieusement.

  • Les procédures et leur importance au sein d’une organisation

Pour atteindre ses objectifs fixés préalablement, l’entreprise doit définir préalablement une méthodologie ou procédé dont l’adoption découle de l’expérience et de la théorie.

L’ensemble de ces procédés est généralement regroupé et formalisé dans un document appelé manuel des procédures de l’entreprise.

Sans ce manuel, chaque employé serait tenté d’imprimer sa propre marque pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés, avec le risque de perdre du temps, de créer des dépenses inutiles et de monopoliser les secrets de l’entreprise. 

b) Les outils de contrôle et de pilotage de la gouvernance d’entreprise

A partir du moment où une entreprise unipersonnelle commence à s’étendre au travers d’agences ou de succursales, le besoin d’outil de contrôle et de pilotage nait immédiatement car le promoteur est en ce moment obligé de confier des pans de responsabilité de gestion quotidienne à des tiers.

Dans la plupart des cas, ceux des entrepreneurs individuels qui s’engagent dans cette voie, sans la mise sur pieds de dispositifs de contrôle et de pilotage solide sont le plus souvent surpris de ne pas avoir les rendements attendus. Parfois même, ils constatent un enrichissement des personnes à qui l’activité a été confiée, ceci à leurs détriments : c’est la problématique de l’asymétrie de l’information.

C’est également la même problématique dont font face l’Assemblée Générale des actionnaires d’une entreprise vis-à-vis d’un Directeur Général ou d’un Conseil d’Administration à qui la responsabilité de la gestion optimale de l’entreprise a été confiée. Dans ces assemblées générales, une autre problématique émerge, à savoir l’équilibre des pouvoirs entre les parties prenantes.

Pour faire face à ces problématiques, des dispositifs de contrôle et de pilotage ont été conçus pour une gouvernance efficace des organisations. Il s’agit de trois principaux outils qui sont :  le comité d’audit, le service de l’audit interne et le système de contrôle interne.

  • Le comité d’audit

C’est un organe du Conseil d’administration qui s’occupe de la supervision de l’évaluation du système de contrôle interne de l’entreprise, y compris de la sécurité du système d’information. Ce comité est constitué d’actionnaires, mais aussi d’experts capables de comprendre et d’apporter leurs éclairages au Conseil d’Administration sur les différentes questions de la gestion de l’entreprise.

Dans le cadre des entreprises unipersonnelles, notamment les PME, le promoteur peut également mettre sur pied, en fonction de la taille de son entreprise, un comité d’audit constitué d’expert pour avoir plus d’éclairage   dans le pilotage de ses différentes entités disséminées dans une ville ou sur le territoire national.

  • Le service d’audit interne

C’est le service qui s’occupe de l’évaluation du système de contrôle interne afin de donner une assurance au Conseil d’Administration via le comité d’audit, sur sa capacité à permettre à l’entreprise d’atteindre ses objectifs.

Dans le cadre des grandes entreprises managériales, c’est- à dire avec actionnariat et confiée à un manager, les services d’audit internes sont occupés par un responsable de l’audit interne qui dispose d’une indépendance totale vis- a vis du manager, mais travaille au sein de l’entité comme tous les autres personnels.

Dans le cadre des PME qui ne disposent pas assez de moyens pour payer un auditeur interne, ce service peut être externalisé à travers le recrutement d’un consultant pour assumer cette fonction.

  • Le système de contrôle interne

Toute organisation, dès sa création, se fixe des objectifs à atteindre. Or, la réalisation de ces objectifs n’est pas une certitude absolue du fait des aléas divers qui interviennent dans la vie de chaque organisation. En plus d’empêcher la réalisation des objectifs fixés, certains aléas sont de nature à porter atteinte même à la survie de l’organisation.

Pour faire face à ces aléas, l’organisation, peu importe sa taille, doit veiller à mettre sur pieds un dispositif de contrôle interne efficace. Le COSO définit le système de contrôle interne comme l’ensemble du dispositif mis en œuvre au sein de l’entreprise pour fournir une assurance raisonnable concernant la réalisation des objectifs dans les catégories suivantes :

  • Efficacité et efficience des opérations ;
  • Fiabilité du reporting financier ;
  • Conformité avec les lois et règlements applicables.

La mise en œuvre harmonieuse de l’ensemble de ces outils traduit une pratique totale de la gouvernance d’entreprise dans une entité.

Après avoir énuméré les principaux outils de la gouvernance d’entreprise, son rôle dans le développement des organisations peut être appréhendé aisément.

2- Les bénéfices de l’adoption et de la mise en œuvre des outils de la gouvernance d’entreprise dans le développement de la PME et des organisations camerounaises

L’importance de la gouvernance d’entreprise dans le processus de développement des PME et des organisations en général s’apprécie essentiellement au regard de la mise en application effective de ses outils qui garantissent les résultats suivants, facteurs essentiels dans le développement de la PME : une meilleure réputation pour la construction de partenariats solides (a), la disponibilité et la fiabilité de l’information du promoteur (b), les procédures pour une meilleur compétitivité (c).

a) Le développement de partenariats grâce à la réputation de l’entreprise

Le processus de croissance des PME leurs impose de développer et d’entretenir des relations avec des partenaires d’affaires solides. Ces partenaires d’affaires sont généralement les fournisseurs, les consultants, le personnel, l’administration fiscale, les banques et établissements de micro-finance.

  Le facteur clé pouvant assurer la pérennité de ce partenariat c’est la réputation de l’entité qui se traduit par la transparence dans ses rapports et activités, ainsi que le respect de ses engagements. La mise en œuvre des outils de la gouvernance d’entreprise va donc favoriser le respect de ces exigences.

 b) La bonne information du promoteur et des partenaires

Bien que le promoteur de la PME n’ai le plus souvent pas de compte à rendre à un conseil d’administration, il doit à tout moment être capable d’évaluer l’état d’avancement de ses activités, ainsi que les résultats obtenus, au regard des dépenses effectuées. De plus, si des activités et des responsabilités sont confiées à des tiers, il a les besoins d’obtenir la bonne information y découlant.

La mise sur pied des outils de la gouvernance d’entreprise va lui permettre de parvenir à ses fins à travers l’instauration un dispositif de comptabilisation journalière des opérations et de production d’une information financière fiable.

 c) Promotion de la compétitivité de l’entreprise

Etant donné que la PME a besoin de créer des richesses pour survivre, elle doit produire en quantité et en qualité suffisante pour satisfaire sa clientèle. Elle doit également disposer la capacité de commercialiser ses produits.

Ainsi, la Pour y parvenir, il lui est indispensable de mettre sur pieds une structure organisationnelle et un système de procédure adéquat, ainsi qu’un système de contrôle interne efficace.

Au regard de ce qui précède, il est facile de conclure que la mise en application de ces outils, en fonction de la taille de l’entreprise n’est pas facultative et représenterait de véritables atout pour une entreprise.

III- La contribution de l’APGAIDO au processus de développement des PME et des organisations camerounaises

Afin d’apporter sa contribution à l’amélioration de la survie et au développement des PME et des organisations camerounaises, l’APGAIDO a procédé à un diagnostic. Il convient tout d’abord de présenter l’APGAIDO (A) avant d’exposer les résultats du diagnostic effectué ayant permis d’aboutir aux solutions préconisées (B).

A- Présentation de l’APGAIDO

La présentation de l’APGAIDO va s’articuler autour de sa définition contexte et justification de sa création (1), ses missions (2), ses objectifs (3), sa vision (4), sa démarche, ses métiers et ses atouts.

1- Définition et du contexte de création de l’Association

L’Association de Promotion de la Gouvernance et de l’Audit Interne pour le développement des organisations (Collectivités Territoriales Décentralisées, Associations, ONG, établissements et instituts d’enseignements privés, EMF…) dénommée APGAIDO est une association professionnelle et apolitique qui est née du constat de la faiblesse du dispositif de gouvernance et de l’inefficacité des mécanismes de gouvernement de nombreuses organisations et PME, ce qui a pour conséquence immédiate un taux de mortalité élevé de ces dernières et une croissance timide de celles qui résistent.

2- Les missions de l’APGAIDO

L’association s’est fixé pour mission :

  • D’accompagner les organisations et PME dans leurs processus de création de valeurs et de développement par la mise en œuvre ou l’évaluation du système de gouvernance, de gestion des risques et de contrôle de ces dernières ;
  • D’accompagner les bailleurs de fonds, le Gouvernement dans la mise en œuvre de leurs politiques d’accompagnement des organisations et PME dans leur processus de développement.

3- Les objectifs

Afin de contribuer au Processus d’émergence du Cameroun à l’horizon 2035, l’APGAIDO, à travers ses missions, vise les objectifs suivants :

  • Contribuer à lutter contre la mortalité des PME ;
  • Accompagner les PME dans leur processus de développement ;
  • Promouvoir la recherche universitaire dans les domaines de la Gouvernance, gestion des risques et Contrôles ;
  •  Faciliter l’insertion professionnelle des diplômés des universités et grandes écoles Camerounaises par les activités de volontariat ;
  • contribuer à la promotion de la dynamique « qualité » au sein des PME ;
  • apporter un appui aux PME pour la mise sur pied des systèmes d’informations financières et comptables efficace, nécessaire pour la constitution du « capital confiance » et l’amélioration de la « NOTE ou raiting »  des PME ;
  • Favoriser la formation et la certification des membres de l’association et des cadres des organisations en audit interne ;
  • Promouvoir la bonne gouvernance à partir du tissu familial ;
  • Contribuer à l’optimisation des politiques gouvernementales de lutte contre le chômage et la pauvreté.

4- La vision

La vision de l’APGAIDO est de devenir d’ici 2023 une structure de référence, cheville ouvrière de l’accompagnement des organisations et des PME dans leur processus de développement au Cameroun et à l’international.

B- Les résultats du diagnostic des PME et organisations camerounaises effectuées par l’APGAIDO et ses propositions

Afin de proposer des solutions concrètes (2) pour le développement des organisations au travers de la gouvernance d’entreprise, nous avons procédé à un diagnostic des PME et autres organisations camerounaises dont les résultats (1) sont présentés ici.

1- Résultat du diagnostic de la pratique de la gouvernance au sein des PME et autres organisations camerounaises

Notre diagnostic s’est appuyé sur les outils de la gouvernance présentés plus haut et la forme ou la taille de l’entreprise. Sur cette base, nous avons séparé nos résultats en deux catégories : celui des organisations unipersonnelles dans laquelle se retrouve la majorité des PME et celui des organisations avec conseil d’administration

a) Diagnostic de la pratique de la gouvernance par les sociétés unipersonnelles camerounaises : cas des PME

Sur la base des études citées plus haut et des études présentées en entreprise, il se dégage que dans de nombreuses PME, les procédures et la structure organisationnelle n’existe pas, tout dépendant de la volonté et de l’inspiration du promoteur, ce qui provoque une dépendance totale de l’entreprise vis-a-vis de sa personne. En son absence ou en cas d’empêchement, tout s’arrête car même présent au lieu de travail, les employés font juste semblant. 

Lorsque les procédures existent, elles ne sont pas respectées ou adaptée à l’organisation. Aussi, lorsque l’organigramme existe, les pouvoirs et les responsabilités ne sont pas clairement définies. Cette situation amène les pme à ne pas être compétitives, à ne pas respecter leurs engagements et à ne pas offrir un service de qualité en permanence du fait de la variabilité des processus et des donneurs d’ordre.

En plus de cela, les PME ne disposent pas de système de contrôle interne et de gestion des risques, ce qui les rend vulnérable aux moindres choc.

Par conséquent, il n’est pas surprenant de voir les PME camerounaises avoir un taux de mortalité élevé et de ne pas être en mesure de se développer efficacement, au regard de la bonne mise en pratique des outils de gouvernance.

b) Diagnostic de la pratique de la gouvernance par les organisations avec conseil d’administration camerounaises : cas des entreprises publiques, des SARL et des coopératives

 Au Cameroun, les pouvoirs publics sont assez sensibilisés sur la problématique de la gouvernance d’entreprise, ce qui a conduit à l’adoption de lois distinctes, dédiées à la gouvernance d’entreprise en fonction de la nature et du secteur d’activité de l’entreprise. Ces lois indiquent clairement les organes devant assurer la gouvernance d’entreprise au sein de ces différentes entités, ainsi que leurs prérogatives. Il s’agit en l’occurrence des assemblées générales, du Conseil d’administration ou comité de pilotage dans certains organes et de la Direction Générale ou coordonnateur des activités.

 La loi prévoit également que des statuts spécifiques soit adoptés par les principaux responsables de chaque entité pour définir de manière précise les pouvoirs et limites de chaque organe et préciser les outils qui seront mis en œuvre pour assurer une gouvernance optimale de l’entité.

Par conséquent, que ce soit dans une entreprise publique ou dans une coopérative, on retrouvera toujours selon la nécessité, une assemblée générale, un conseil d’administration, une direction générale, un organigramme et un manuel de procédure.

Seulement, dans la réalité des faits, la pratique effective de la gouvernance d’entreprise qui consiste en la la mise en orchestre de tout cet ensemble, pose un véritable problème du fait de la psychologie humaine et de la complexité proprement dit d’un tel dispositif.

En effet, la psychologie humaine amène beaucoup de responsables à ne pas vouloir céder une quelconque parcelle de leurs pouvoirs et parfois à ne pas reconnaitre leurs limites pour certains. Aussi, la mise en œuvre de ce dispositif de gouvernance nécessite des connaissances préalables sur la nécessité d’une gouvernance efficace pour une organisation. Par conséquent, si les différents acteurs de la gouvernance ne sont pas suffisamment sensibilisés sur la question, la mise en œuvre de tout ce dispositif peut s’avérer assez complexe.

      Ainsi, dans une majorité d’entreprises du secteur public et privé, du secteur des coopératives et des associations, la mise en œuvre effective de ces dispositifs de gouvernance est le plus souvent très éloigné de ce qui a été effectivement prévu et cela se traduit le plus souvent par :

  • La faiblesse du dispositif de contrôle interne du fait de l’absence d’une philosophie du contrôle ;
  • L’absence de mécanisme de gestion des risques.

Pourtant, ces deux éléments sont indispensables pour la performance de toute organisation et la survie d’une organisation ne sauraient être négligés. En effet, si une entreprise peut obtenir tous les financements ou tous les bons de commande du monde, mais ne dispose pas d’un système de contrôle interne et d’un mécanisme de gestion des risques efficaces, non seulement elle ne sera pas capable de respecter ses engagements, mais aussi, elle ne sera pas capable d’assurer en permanence à sa clientèle un service ou un produit de qualité. Toutes chose qui vont toujours la conduire vers un échec retentissant à chaque fois.

Cet état de chose justifie donc amplement la faible capacité de développement de nos organisations, ainsi que leurs taux de mortalité élevé.

2- Les solutions proposées par APGAIDO pour une gouvernance efficace

Afin de promouvoir la gouvernance d’entreprise à travers ses outils comme véritable moyen d’assurer le développement et la pérénité des PME et de organisations camerounaises, l’APGAIDO envisage deux types d’actions : la sensibilisation (a) et l’accompagnement (b).

a) La sensibilisation

Pour que les Présidents de Conseil d’Administration, les promoteurs de PME, des coopératives, GIC et associations puissent percevoir l’importance de la pratique effective de la gouvernance d’entreprise dans leurs entités, il est nécessaire de les sensibiliser.

En effet, ces responsables et promoteurs perçoivent la pratique de la gouvernance comme une activité destinée uniquement à satisfaire la loi. Pourtant, la survie et le rayonnement de l’entreprise en dépendent.

b) L’accompagnement

La mise en œuvre de systèmes de contrôle interne et de gestion des risques, le fonctionnement d’un service d’audit interne et l’évaluation de l’ensemble de ce dispositif sont des activités suffisamment techniques qui requiert des compétences qui ne sont pas souvent à la portée de toute entreprise.

Par conséquent, l’APGAIDO en a fait une de ses missions principales compte tenu de sa capacité à mobiliser les ressources humaines formées dans les différentes universités.

A cet, effet, un programme d’accompagnement des PME et de toutes autre s organisations camerounaises a été conçu par l’APGAIDO.

Nous vous remercions


[1] Les défis du financement des PME, www.afrilandfirstbank.com

[2] P. Conso, F. Hémici : « l’entrprise en 20 leçons, stratégie gestion fonctionnement », DUNOD, 2001.